Deux films, deux mondes. Mais qui sont les barbares dans “Banlieue 13 ultimatum” et “N’Djaména city” ?
Mercredi 25 février 2009Pas de censure en France et ailleurs… On peut traiter de tout au nom de la culture ? …
Mais en voix off au nom des droits de l’homme.
Le lien entre les deux ? Cette violence et cette dureté de tous les instants qui nous envahit face à une société de plus en plus inégalitaire et qu’on ne peut plus cacher…. D’un réalisme de plus en plus violente aussi pour les représentations cinématographiques qui en sont faites. Dure réalité des banlieues aujourd’hui . Doit on utiliser ce creuset pour en faire une fixion pour demain ?
Il y a eu polémique sur la diffusion du film de Luc Besson non diffusé dans les salles UGC de banlieue…Brimade, danger de violence ? Mais la violence elle est là, tous les jours au banc et au coeur de nos villes, même sans filmologie fixion…
Regardez et entendez ce qui se passe dans nos frontières. Parallèlement à la sortie de ce film il y a en vrai en banlieue, le drame de ce policier tué, non pas par des habitants d’un quartier, dans le cadre d’une rixe qui a mal tourné… mais “par des srilankais” ont dit les médias. ça change tout ? Le crime devient il différent en agitant la peur de l’étranger ?. Où cela cela entretient il la pression et les images négatives sur ces villes où se réfugient nombre d’immigrés, les logements y étant moins cher ?… En l’occurrence, ce policier père de famille, “pas en service” a-t-on encore précisé, aurait été tué avec son arme de service après avoir été désarmé. Ces supposées précisions sont elles nécessaires et utiles du grand public autrement que pour semer le trouble ou jeter l’opprobe ? .
Comment aurait été racontée l’histoire à la télé ou dans les journaux si le policier avait été désarmé par des français bretons ou corses, puis tué par l’un d’entre eux ?…
De ce vécu pour de vrai mais raconté d’une telle manière que cela permet toutes les interprétations et transforme une réalité en elle même déjà tragique, peut on en faire un film dès maintenant ou plus tard ? A t on le droit ? Convenablement traité et devenu “fait divers” il pourra même être subventionné par le ministère de la culture et la “Politique de la ville” (ou ce qu’il en reste !) ?. Après sa sortie il sera peut être interdit dans les salles UGC des bancs de ville pour être diffusé dans les beaux quartiers, histoire de permettre aux bourgeois (dont je suis !) de s’encanailler un peu et dans les salles d’art et d’essai; là où la réflexion est indolore car elle ne touche plus que quelques bobos et des militants de gauche loin de la politique bling bling que l’on passe son temps à neutraliser… Et qu’est ce que ça changera dans les “quartiers” de banlieues ?.
ça va marcher encore combien de temps ces petits arrangements entre nantis en dessous du CAC 40 qui font du soit disant art avec la vie et la mort dans ce qu’elle a de plus agressive.
Mais revenons à “Banlieue 13 Ultimatum”, une fixion certes, mais avec de sacrées bouffées de réalité à peine masquées. Rassurez vous pourtant, en ce qui concerne sa soit disant dangerosité. C’est moins violent que certaines BD ou jeux vidéo qui ornent vos écrans de télé à l’heure du goûter des enfants.
Ce film est projeté ici à Evry en ce moment… On n’a pas de salle UGC, pour une fois on ne va pas s’en plaindre. C’est pourtant bien la banlieue parisienne ici; et même si l’image de la ville a changé, le fond, pour ne pas dire le fond de commerce reste le même.
Pourtant, je peux vous dire messieurs UGC et politiques locaux associés que “vous vous êtes flanqués la trouille” pour rien. Oui, projeter ce film en banlieue c’est sans risque. Parole d’évryenne. On n’est pas des sauvages et on sait faire la part des choses, même si entre fixion et réalité, je vous l’accorde, la marge est parfois un peu étroite.
La preuve, à Evry à la séance de 20 heures il n’y en avait qu’une poignée de ces ”gens” un peu ciblés dans le film, “marqués du fer rouge quartier difficile”, dans la plus grande salle du multiplex. Le reste des regardants, c’étaient quelques moins jeunes et pas ciblés… du moins en apparence, répartis aux quatre coins de la salle. 40 spectateurs au bas mot en tout et pour tout, sur une agglo de plus de 100 000 habitants.
Et oui, il y a bien longtemps que “les jeunes des quartiers”, désignation générique qui dans la tête du téléspectateur désigne aussi bien les jeunes (plus très jeunes pour beaucoup d’ailleurs) paumés, chômeurs oisifs, drogués, accrocs des jeux ou du bistrot, dragueurs, voleurs, fumeurs de joints, dealers, sans papiers et colorés pour beaucoup, ni plus ni moins dangereux qu’ailleurs… Mais tous avec ce point commun, une carte identitaire qui colle à la peau … Une adresse en banlieue dans un quartier dit “défavorisé”.
C’est vrai, il y a tout cet amalgame dans la tête des gens. Alors ça nous fait peur ? Mais qui a regroupé ou donné le non choix à tant de personnes devenues semblables à force de se croiseret de rencontrer seulement des difficultés et de la violence dans leur cage d’escalier ?
D’abord, c’est bien connu, la peur n’évite pas le danger. C’est comme la richesse vous savez. Est ce que le fait de parler de devenir riche vous a rendu riche ?
Et puis, je vais vous faire une confidence à vous lecteurs… Il y a tout lieu d’être rassurés ! Ceux que vous ciblez par ce vocable générique là, vous ne les verrez pas au cinéma car il y a belle lurette qu’ils n’y vont plus. Le cinéma ne les intéresse même plus ou c’est trop cher.
Au mieux, quand le film leur plait ils envoient un pote qui enregistre et renvoie gratis via son portable les extraits sélectionnés selon ses critères.
Alors vous, hors de ces quartiers de déshérence, abandonnés de la légitimité et du respect auquel ils et nous qui sommes aux frontières ont encore droit… Il serait peut être temps d’apprendre à les regarder autrement que par le petit bout de votre lorgnette genre “Capitaine Crochet”… Ces enfants devenus grands étaient comme les autres à la crèche ou devant la télé, anciens amateurs de l’ile aux enfants… Même s’ils ont sévèrement changé et ne font plus vraiment rêver, je vous l’accorde !
Je ne suis pas une fan de ce genre de film, mais dans “Banlieue 13″ nouveau, la réalité est bien épinglée et les outrances regardables… Du coup, pour les amateurs, il y a de belles scènes de sauts dans les airs d’une tour à l’autre, et puis sous terre des cascades un peu hard. Tout compte fait c’est une version revisitée du “Bon de la brute et du truand”. Moi, ça me fait un peu mal au coeur, une telle avalanche de violence, de brutalité et de bleu à l’âme et je préfère un bon western (vieux jeu tant pis !). Mais en regardant dans le rétroviseur je me dis que ces exagérations sont un mal pour un bien et qu’il faut parfois savoir forcer le trait pour montrer que la corruption, la violence, la manipulation, le manque de savoir être, l’absence d’humanité et même le non respect des lois… ne sont pas toujours du même côté, qu’il y a des “ici” de désespoir sans espoir, et qu’avec nos cités ghetto encore vivantes (sans trop forcer le trait comme dans le film), on frôle la catastrophe à chaque instant.
Alors, le lien avec “N’Djaména” projeté en collaboration avec la maison du monde et les cinoches de Ris Orangis ?
Et bien, c’est encore une fixion violente ou un conte à faire peur si vous préférez ? Non, plutôt une réalité qui décline un passé très proche dans un lieu réel, au temps présent, aux traits parfois forcés avec une fin un peu enrobée et “happy end” avec de vrais acteurs pour que ça ne fasse pas trop vrai et que ça puisse passer… la censure !
Ce film nous entraine dans un monde de violences et de tortures au Tchad du temps lointain d’avant Idriss Deby bien sûr. Avec pas un… africain pour le présenter à Ris Orangis ni dans la salle pour le regarder non plus. Quant à nous les un peu blancs de peau nous n’étions pas très nombreux autour des animateurs du débat qui a suivi avec Amnesty et Reporters sans frontières. Dommage.
C’était pourtant un film produit et joué par des africains, subventionné par plusieurs pays africains (Gabon, Tchad, Maroc…) et subventionné entre autres par le ministère des affaires étrangères français.
Deux films, deux continents. Pourtant deux versants d’un même monde, celui de l’injustice, de la violence, du désespoir, mais aussi une approche de la malédiction qui pèse sur les gens dits d’en bas, la lacheté et l’hypocrisie des alliances convenues, la corruption aussi parfois, avec à chaque fois en toile de fond une majorité plus ou moins silencieuse toujours respectueuse (même si les formes ne sont pas toujours convenues) en quête de justice, de partage et d’humanité…
Ces mondes éloignés par la distance et le mode de vie sont rapprochés par la pellicule. Mais la pellicule a besoin de circuler mieux pour nous aider à ouvrir les yeux. Même si elle ne soigne pas le mal profond qui ronge nos sociétés, si elle ne répare pas les dégats faits aux âmes et aux corps, elle permet au moins d’éveiller en troublant les consciences.
Et après ? Et bien, après il n’ y a plus qu’à. Informez vous, prenez part aux débats dans vos villes, c’est trop important pour laisser les politiques professionnels agir seuls. Réagissez mais surtout agissez…
Il est déjà bien tard. Et vous les conseillers culturels en poste en Afrique et ailleurs en méditerranée (surtout chez les subventionneurs ! et leurs voisins) Je ne vous demande pas grand chose. Seulement de projeter “N’Djaména city”… Dans les centres culturels français du bassin méditerranéen et en Afrique. C’est de la prévention des risques à inscrire dans la charte du développement durable. Si, si. Par ces images vous informerez de la barbarie, celle qui existe encore ou celle encore en devenir, qui peut encore surgir… à tout moment : ”Car le ventre est encore fécond… d’où a surgit la chose immonde”.
Jusqu’à où jusqu’à quand ? La barbarie version moderne ?
Je vous souhaite une bonne journée.