define('WP_CRON_LOCK_TIMEOUT', 300); Le blog de Myriam Heilbronn » 2011» février

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Scènes de la vie dite ordinaire dans le RER , salle des pas pressés franciliens à la gare de Lyon

Lundi 21 février 2011

Il était une fois un milieu d’après midi de semaine ordinaire dans la salle de jonction à l’étage, vous savez, ce lieu de passage obligé entre les RER A et D, la ligne 14 et la sortie vers les grandes lignes.

D’abord ici, pas d’invitation aux voyages à faire rêver dans ce lieu dit d’échange qui doit être neutre pour rester fluide ? tant il est “sollicité et approché” par nombre d’emprunteurs quotidiennement.

Cet espace tout carrelé de blanc virant au gris souris est aussi attrayant que des WC publics. Tout y est est conçu pour se confondre allègrement avec la morosité ambiante. C’est au moins une raison pour ne pas avoir envie de s’y attarder même s’il y fait moins froid que sur les quais du RER D ventilés par sa trouée à l’air libre toute proche en direction de la banlieue sud.

Une odeur forcée de viennoiserie y plane à toute heure  salariale réglementaire type “35 heures” émanant du stand tout proche, sémaphore de vie et seul lieu animé d’un semblant de convivialité. 

Ce lieu passant, anonyme, sans âge et sans âme mais propre, labellisé SNCF/RATP, est largement plus grand que n’importe quelle place évryenne ou même que nombre de places parisiennes, n’a pas de nom. Celui là personne n’a pensé à le baptiser d’une plaque et à l’inaugurer !

Pourtant il en reçoit de la visite, comme d’autres d’ailleurs plus marchands à Auber ou plus saturés comme à Chatelet les Halles ou sans fin comme à la gare du nord. Nombre de grands voyageurs empruntent souvent ce haut lieu de mixité sociale où se cotoyent sans le savoir cadres sups, patrons, notaires, médecins, chômeurs, mères de familles aux poussettes insécures dans ce dédale d’escaliers roulants enchevétrés (même si maintenant des ascenseurs …mais qui vous font rater régulièrement votre train car jamais au bon endroit ou en panne !), retraitées, gamins avec leurs classes, écrivaines, journalistes, députés, sénateurs (si si eux avec une carte gratuite) et même ministres restés ? ou qui veulent “faire peuple”… Et ces passagers sont de toutes les couleurs de peau et de cheveux, quand ils en ont encore ( des cheveux) car certains n’ont vraiment pas de pot !

C’est donc dans ce haut lieu d’interconnexion de passage obligé que l’autre jour, à une heure dite creuse de l’après midi, je me suis arrêtée vingt cinq minutes, venant juste de rater un train, à l’abri des courants d’air de la voie 3 de mon RER D préféré.

Et, debout, car il n’y a pas un siège, (lieu pour passer, pas pour rester, telles sont les codes de l’urbanisation actuelle, bien loin de la définition du mot “urbaniser”) à proximité du panneau indicateur, je suis restée là à regarder, puis à observer. Devinez qui ?

Et bien, un groupe de trois gendarmes, oui, oui, des vrais, postés là, en face des portillons d’accès à cette “salle des pas pressés” voire “pressurés” à certaines heures ! qui guettaient, telle une police aux frontières ou à un check point quelconque de Cysjordanie, les importuns anonymes osant enfreindre les lois des lignes de contrôle magnétiques.

Et oui, tous les jours, même avec un billet valable certains-certaines sont obligés de “forcer le passage”en sautant par desssus le tourniquet  ou en se faufilant derrière quelqu’un, après avoir été bloqués par un voyageur précédent trop lent ou trop rapide dans son avancée et qui avait mal validé son ticket, ou parfois en mal de billet !

ça ne vous est jamais arrivé ? Moi si.

Et là, de mon poste d’observation j’ai bien vu qui se faisait choper, un et deux et trois en dix minutes.

Les trois jeunes gendarmes postés prêts à agir, à l’allure déterminée, n’étaient pas visiblement des usagers assidus de ce type de transports, autrement ils auraient plutôt chopé le premier que le second lors du contrôle au “barrage”, mais c’est c’est vrai qu’eux ils voyagent gratis dans leurs fourgons, ces pros du maintien de l’ordre et n’ont pas la pratique.

Et  il n’y avait pas de contrôleur SNCF à leurs côtés pour apporter des éclairages de praticiens à la fois plus habitués et plus “hommes de l’art” et peut être du respect des formes.

Etait ce une opération de maintien de l’ordre ou de fraternisation comme en Tunisie ou en Egypte ? Où cherchaient ils quelqu’un ?

En tout cas pendant tout ce temps, ils ont fait du contrôle de voyageurs un peu musclé et sans courtoisie et en plus, apparemment pas vraiment aléatoire.

Trois se sont fait “alpaguer” de l’autre côté du dispositif ex portillon de contrôle pendant que je poireautais.

 un “crème”, mais il a été vite relaché car en règle et français, papiers à l’appui. Circulez, allez allez. Il était prêt à raler… Alors vite vite qu’il parte, surtout qu’une autre cible se profilait qui s’est avérée bien plus “juteuse”, nous le verrons plus bas.

le troisième c’était un “blanc” à peu près de mon âge, grand, au physique plutôt rassurant, je dirai prof de fac ou journaliste, mais les apparences sont trompeuses parfois !  doté d’un chapeau à la Mitterrand. Quand il s’est fait interpeller sans courtoisie aucune il a osé expliquer que son billet qu’il a montré était valable puisqu’il  venait de le valider sur sa portion de trajet précédente sans problème.

Mais voilà, il a refusé de soumettre son billet au test ADN préconisé en refaisant un aller retour dans le dispositif de contrôle. A insister en disant qu’il était en règle il s’est fait sérieusement bousculer par le gendarme qui voulait le forcer à obtempérer.

Mais là, ledit voyageur a insisté en se dégageant et le ton a monté. Tout laisse à croire que tout n’était pas vraiment régulier dans la forme de la part de l’agent de la force publique car il a lâché prise au sens propre du terme et autorisé le “voyageur” à se rendre au guichet voisin des contrôleurs “RATP- SNCF ” où je l’ai suivi pour lui dire que j’étais témoin de la scène. Les contrôleurs lui ont confirmé qu’il était en règle et s’il a été à la limite de porter plainte contre le comportement intempestif du gendarme m’a t il dit, et me remerciant il a poursuivi son trajet, un peu outré tout de même.

Quand au troisième, il était bien le plus sombre de couleur de peau de tous les acteurs de cette scène et par malchance plus jeune et aussi étranger (je le pense compte tenu de ce qui a suivi). Calme, poli et propre sur lui, il a accepté de se soumettre au test du repassage des lignes; opération réussie sans encombres.

Donc il était donc en règle au regard du réseau de transports francilien. Mais voilà, il était étranger. Alors un deuxième round s’est profilé pour lui, une aubaine pour une occupation toute trouvée pour les gendarmes. Et c’est le principe de la double “peine”un contrôle de papiers. Et comme c’est le cas dans ce genre de contrôles sympathiques, des fois qu’il s’enfuie !, deux l’ont encadré ostensiblement comme un prévenu qu’il n’était pas, pendant que le troisième s’éloignait pour téléphoner sans doute au fichier central pour vérification.

Vingt minutes plus tard quand j’ai pris mon train pour Evry il était encore encadré par les deux compères gendarmes pas vraiment en train de jouer une scène à la De Funès pendant que le troisième était toujours au téléphone.

C’est qu’il ne s’appelait sûrement pas Dupont ce jeune monsieur et qu’il avait peut être un certain nombre d’homonymes au fichier  de la préfecture de Paris.

J’espère qu’il n’avait pas de train à prendre ni un entretien d’embauche sur le feu et que tout s’est bien terminé pour lui.

Toutefois s’il se reconnait et que la suite s’est mal passée je veux bien témoigner de ce que j’ai vu.

Et pendant ce temps, on nous parle de sécurité pour la protection et la sérénité du “bon peuple”, on met des caméras partout, on nous émeut à coups de médias avec des souvenirs sombres dits d’une autre époque, quand la police de Vichy descendait dans le métro faire des contrôles et “raffler des gens”. Il parait que c’était au siècle dernier, mais des fois qu’on oublie !

Si on le nommait cet espace ”inommé” “salle des libertés d’aller venir” ou au nom d’un des deux gardiens de la paix, jeunes parents, ces deux là, morts il y a des années dans l’accident du RER D, là juste en dessous, et qui voulaient simplement rentrer chez eux ensemble à Corbeil retrouver leur bébé, ou du nom de ce père de famille de Soisy dont les enfants étaient au collège à Evry et qu’il n’aura pas vu grandir… Et bien d’autres noms sont gravés sur la stèle dont certains ne me sont pas étrangers car j’ai malheureusement croisé leur fin de vie par vie professionnelle interposée; Vous voyez vous avez le choix messieurs de la RATP/SNCF.

En tout cas ce jour là, je me suis clairement sentie dans un Etat policier avec le sentiment confus qu’un des droits fondamentaux, la liberté de circuler dans la capitale du pays des droits de l’homme, n’était pas vraiment respecté !

Je vous souhaite quand même une bonne journée loin des caméras enregistreuses, attention si vous mettez les doigts dans votre nez ! vous êtes filmés.

Quand le vent de la démocratie interroge la vieille Europe. la Tunisie, l’Egypte…

Mercredi 2 février 2011

J’étais frileuse sans doute car je croyais encore trop aux messages ambiants. Et je me suis sans doute laissée trop envahir par le doute, par crainte des extrémismes religieux avec toujours cet épouvantail iranien qu’on nous brandit, pour espérer une évolution démocratique radicale et sans transition en Tunisie comme en Egypte …

Et pourtant, aujourd’hui c’est bien une vraie  Révolution qui est en marche. Quel beau mot quand il est associé à celui de la Démocratie, dans ces deux pays tournés vers l’Orient qui l’ont tellement connue et tellement partagée au cours de leur longue Histoire … si longue et qui n’aspirent qu’à retrouver très vite ce droit  fondamental à la vie dans la Cité.

Et ces deux peuples ont aussi connu des temps plus durs d’occupation hier et de dictature ont toujours su redevenirs libres et parfois accueillants quand les tempêtes dénigrement et du déni soufflaient chez leurs voisins.

Et oui, c’est bien la Tunisie de Bourguiba qui a osé un temps accueillir une autorité palestinienne malmenée et pourchassée quand elle était rejetée partout et qui a coupé cette main tendue ?

A côté, notre France est une vraie gamine face aux traditions millénaires de ces ”civilisations méditerranéennes” même si elles ont un petit peu quand même su “déborder” chez nous et pas seulement à l’insu de notre plein gré. Mais en avons su toujours faire notre miel ?

Pendant la période Ben Ali, alors qu’ils étaient pourchassés dans leur pays, nous nous sommes contentés d’accueillir plus ou moins frileusement quelques opposants, ceux qui avaient un nom et qui nous semblaient présentables … Toutefois sans les écouter pour nous interroger sur nos propres alliances, et surtout sans remettre en cause notre soutien à un appareil de plus en plus tyranique ni même sans oser nommer ces excès et encore moins rompre avec ces dictateurs corrompus.

Nous n’avons d’ailleurs pas toujours su les protéger ces exilés …

Et puis surtout, nous n’avons pas voulu leur faire confiance à ces démocrates riches de leur expérience, de leur connaissance et de leur combat contre l’oppresseur, prêts à nous donner les clés de leur Savoir, nous avons ignoré qu’il s’agissait de notre bien commun et pas seulement de leur dignité mais aussi de notre savoir être. 

Nous n’avons accueilli que des “Noms” au catalogue de “nos réfugiés politiques” mais par leur âme et parfois peut être pratiqué un certain “chantage” au nom des intérêts d’Etat ou financiers …

Quand arrêtera -t- on de penser que tout ce qui vient d’Orient est un risque et que le modèle pacifiste ne concerne que l’Europe et les Etats Unis.

Regardez nous et regardez un peu plus loin ce qui s’est passé au nom de la liberté, et sans terrorisme, en Afrique du Sud et aujourd’hui à Bil’in et dans d’autres villages de Palestine.

On les dit “opposants” “réfugiés politiques”ces tunisiens et égyptiens (aujourd’hui peut être algériens, maurétaniens… demain) mais jamais “résistants”.

Cela nous dédouane le plus souvent de  nous assurer de leur sécurité, cela nous évite de prendre en compte  leurs messages  d’inquiétude quand ils continuent à être poursuivis sur le sol français, où faute de protection ils risquent leur vie à tout moment pour vouloir la liberté de leurs peuples. Et oui, ils sont en danger même dans leur exil, même au nom du droit des peuples à disposer d’eux mêmes.

Et à chaque fois, sur ces terres redevenues indépendantes, comme de vieux colons repentis mais incapables de faire notre comeback, nous avons laissé monter l’autocratisme et même soutenu ceux qui muselaient les opposants pour acheter notre tranquillité et le plus souvent pour continuer à faire des affaires dans ces pays “calmes au pouvoir solide” et surtout à bas coût de maind’oeuvre.

Et quand la rue grondait, quand les rumeurs s’amplifiaient, quand certains mouvements d’argent devenaient bizarres ou des comportements tapageurs,   nous nous sommes mis des bouchons d’oreilles et avons beurré nos lunettes pour ne pas entendre et ne pas voir ce que ces opposants dénonçaient, allant parfois jusqu’à faire pression sur eux au nom de leur statut de “réfugiés” pour qu’ils restent discrets ou qu’ils se taisent au risque d’être expulsés …

Alors ? aujourd’hui c’est à nous tous, car c’est notre devoir, nous ces français sur une Terre où nous sommes censés être égaux en droits, de mieux comprendre, de savoir partager et soutenir le changement pour plus de démocratie vers l’Orient aujourd’hui comme nous avons su le faire avec l’Espagne il n’y a pas si longtemps et au Portugal avec la révolution des oeillets.

Il y a eu le siècle des lumières, pourquoi le 21 ème siècle ne serait pas celui de la Démocratie et du dialogue entre les peuples retrouvés … Si nous sommes mal barrés en regardant dans le rétroviseur de ces dix dernières années, il nous reste encore … Aussi n’attendons plus pour bien faire et faire durer !!! C’est le plus difficile “car le ventre est… “je vous laisse terminer  cette phrase de Brecht à la fin Artur UI.

NB : Que certains excusent mon inexpérience pour parler d’un sujet aussi pointu que je maîtrise peu.

Pourtant,  modestement il me semble que je le devais en souvenir de ces trois jeunes gens, hommes et femme tunisiens avec lesquels j’ai échangé dans le RER D la veille de la fuite de Ben Ali  et aussi en souvenir de cet Egyptien de France qui s’est tant engagé pour la liberté du peuple algérien et au Moyen Orient … et qui a été assassiné un jour à Paris.

 Je vous souhaite une bonne journée.