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Scènes de la vie dite ordinaire dans le RER , salle des pas pressés franciliens à la gare de Lyon

Il était une fois un milieu d’après midi de semaine ordinaire dans la salle de jonction à l’étage, vous savez, ce lieu de passage obligé entre les RER A et D, la ligne 14 et la sortie vers les grandes lignes.

D’abord ici, pas d’invitation aux voyages à faire rêver dans ce lieu dit d’échange qui doit être neutre pour rester fluide ? tant il est “sollicité et approché” par nombre d’emprunteurs quotidiennement.

Cet espace tout carrelé de blanc virant au gris souris est aussi attrayant que des WC publics. Tout y est est conçu pour se confondre allègrement avec la morosité ambiante. C’est au moins une raison pour ne pas avoir envie de s’y attarder même s’il y fait moins froid que sur les quais du RER D ventilés par sa trouée à l’air libre toute proche en direction de la banlieue sud.

Une odeur forcée de viennoiserie y plane à toute heure  salariale réglementaire type “35 heures” émanant du stand tout proche, sémaphore de vie et seul lieu animé d’un semblant de convivialité. 

Ce lieu passant, anonyme, sans âge et sans âme mais propre, labellisé SNCF/RATP, est largement plus grand que n’importe quelle place évryenne ou même que nombre de places parisiennes, n’a pas de nom. Celui là personne n’a pensé à le baptiser d’une plaque et à l’inaugurer !

Pourtant il en reçoit de la visite, comme d’autres d’ailleurs plus marchands à Auber ou plus saturés comme à Chatelet les Halles ou sans fin comme à la gare du nord. Nombre de grands voyageurs empruntent souvent ce haut lieu de mixité sociale où se cotoyent sans le savoir cadres sups, patrons, notaires, médecins, chômeurs, mères de familles aux poussettes insécures dans ce dédale d’escaliers roulants enchevétrés (même si maintenant des ascenseurs …mais qui vous font rater régulièrement votre train car jamais au bon endroit ou en panne !), retraitées, gamins avec leurs classes, écrivaines, journalistes, députés, sénateurs (si si eux avec une carte gratuite) et même ministres restés ? ou qui veulent “faire peuple”… Et ces passagers sont de toutes les couleurs de peau et de cheveux, quand ils en ont encore ( des cheveux) car certains n’ont vraiment pas de pot !

C’est donc dans ce haut lieu d’interconnexion de passage obligé que l’autre jour, à une heure dite creuse de l’après midi, je me suis arrêtée vingt cinq minutes, venant juste de rater un train, à l’abri des courants d’air de la voie 3 de mon RER D préféré.

Et, debout, car il n’y a pas un siège, (lieu pour passer, pas pour rester, telles sont les codes de l’urbanisation actuelle, bien loin de la définition du mot “urbaniser”) à proximité du panneau indicateur, je suis restée là à regarder, puis à observer. Devinez qui ?

Et bien, un groupe de trois gendarmes, oui, oui, des vrais, postés là, en face des portillons d’accès à cette “salle des pas pressés” voire “pressurés” à certaines heures ! qui guettaient, telle une police aux frontières ou à un check point quelconque de Cysjordanie, les importuns anonymes osant enfreindre les lois des lignes de contrôle magnétiques.

Et oui, tous les jours, même avec un billet valable certains-certaines sont obligés de “forcer le passage”en sautant par desssus le tourniquet  ou en se faufilant derrière quelqu’un, après avoir été bloqués par un voyageur précédent trop lent ou trop rapide dans son avancée et qui avait mal validé son ticket, ou parfois en mal de billet !

ça ne vous est jamais arrivé ? Moi si.

Et là, de mon poste d’observation j’ai bien vu qui se faisait choper, un et deux et trois en dix minutes.

Les trois jeunes gendarmes postés prêts à agir, à l’allure déterminée, n’étaient pas visiblement des usagers assidus de ce type de transports, autrement ils auraient plutôt chopé le premier que le second lors du contrôle au “barrage”, mais c’est c’est vrai qu’eux ils voyagent gratis dans leurs fourgons, ces pros du maintien de l’ordre et n’ont pas la pratique.

Et  il n’y avait pas de contrôleur SNCF à leurs côtés pour apporter des éclairages de praticiens à la fois plus habitués et plus “hommes de l’art” et peut être du respect des formes.

Etait ce une opération de maintien de l’ordre ou de fraternisation comme en Tunisie ou en Egypte ? Où cherchaient ils quelqu’un ?

En tout cas pendant tout ce temps, ils ont fait du contrôle de voyageurs un peu musclé et sans courtoisie et en plus, apparemment pas vraiment aléatoire.

Trois se sont fait “alpaguer” de l’autre côté du dispositif ex portillon de contrôle pendant que je poireautais.

 un “crème”, mais il a été vite relaché car en règle et français, papiers à l’appui. Circulez, allez allez. Il était prêt à raler… Alors vite vite qu’il parte, surtout qu’une autre cible se profilait qui s’est avérée bien plus “juteuse”, nous le verrons plus bas.

le troisième c’était un “blanc” à peu près de mon âge, grand, au physique plutôt rassurant, je dirai prof de fac ou journaliste, mais les apparences sont trompeuses parfois !  doté d’un chapeau à la Mitterrand. Quand il s’est fait interpeller sans courtoisie aucune il a osé expliquer que son billet qu’il a montré était valable puisqu’il  venait de le valider sur sa portion de trajet précédente sans problème.

Mais voilà, il a refusé de soumettre son billet au test ADN préconisé en refaisant un aller retour dans le dispositif de contrôle. A insister en disant qu’il était en règle il s’est fait sérieusement bousculer par le gendarme qui voulait le forcer à obtempérer.

Mais là, ledit voyageur a insisté en se dégageant et le ton a monté. Tout laisse à croire que tout n’était pas vraiment régulier dans la forme de la part de l’agent de la force publique car il a lâché prise au sens propre du terme et autorisé le “voyageur” à se rendre au guichet voisin des contrôleurs “RATP- SNCF ” où je l’ai suivi pour lui dire que j’étais témoin de la scène. Les contrôleurs lui ont confirmé qu’il était en règle et s’il a été à la limite de porter plainte contre le comportement intempestif du gendarme m’a t il dit, et me remerciant il a poursuivi son trajet, un peu outré tout de même.

Quand au troisième, il était bien le plus sombre de couleur de peau de tous les acteurs de cette scène et par malchance plus jeune et aussi étranger (je le pense compte tenu de ce qui a suivi). Calme, poli et propre sur lui, il a accepté de se soumettre au test du repassage des lignes; opération réussie sans encombres.

Donc il était donc en règle au regard du réseau de transports francilien. Mais voilà, il était étranger. Alors un deuxième round s’est profilé pour lui, une aubaine pour une occupation toute trouvée pour les gendarmes. Et c’est le principe de la double “peine”un contrôle de papiers. Et comme c’est le cas dans ce genre de contrôles sympathiques, des fois qu’il s’enfuie !, deux l’ont encadré ostensiblement comme un prévenu qu’il n’était pas, pendant que le troisième s’éloignait pour téléphoner sans doute au fichier central pour vérification.

Vingt minutes plus tard quand j’ai pris mon train pour Evry il était encore encadré par les deux compères gendarmes pas vraiment en train de jouer une scène à la De Funès pendant que le troisième était toujours au téléphone.

C’est qu’il ne s’appelait sûrement pas Dupont ce jeune monsieur et qu’il avait peut être un certain nombre d’homonymes au fichier  de la préfecture de Paris.

J’espère qu’il n’avait pas de train à prendre ni un entretien d’embauche sur le feu et que tout s’est bien terminé pour lui.

Toutefois s’il se reconnait et que la suite s’est mal passée je veux bien témoigner de ce que j’ai vu.

Et pendant ce temps, on nous parle de sécurité pour la protection et la sérénité du “bon peuple”, on met des caméras partout, on nous émeut à coups de médias avec des souvenirs sombres dits d’une autre époque, quand la police de Vichy descendait dans le métro faire des contrôles et “raffler des gens”. Il parait que c’était au siècle dernier, mais des fois qu’on oublie !

Si on le nommait cet espace ”inommé” “salle des libertés d’aller venir” ou au nom d’un des deux gardiens de la paix, jeunes parents, ces deux là, morts il y a des années dans l’accident du RER D, là juste en dessous, et qui voulaient simplement rentrer chez eux ensemble à Corbeil retrouver leur bébé, ou du nom de ce père de famille de Soisy dont les enfants étaient au collège à Evry et qu’il n’aura pas vu grandir… Et bien d’autres noms sont gravés sur la stèle dont certains ne me sont pas étrangers car j’ai malheureusement croisé leur fin de vie par vie professionnelle interposée; Vous voyez vous avez le choix messieurs de la RATP/SNCF.

En tout cas ce jour là, je me suis clairement sentie dans un Etat policier avec le sentiment confus qu’un des droits fondamentaux, la liberté de circuler dans la capitale du pays des droits de l’homme, n’était pas vraiment respecté !

Je vous souhaite quand même une bonne journée loin des caméras enregistreuses, attention si vous mettez les doigts dans votre nez ! vous êtes filmés.

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